LE NGOYANOIS

LE NGOYANOIS

lundi 25 juillet 2011

Maternité de Keur Momar Sarr : Des agents plus malades que les patients


Conditions de travail précaires, salaires misérables, tel est le diagnostic fait par les agents de santé communautaire de Keur Momar Sarr. Mais malgré tout, ils continuent de répondre favorablement aux préoccupations des populations en matière de santé.

C’est sous un soleil voilé, laissant échapper de temps à autre des rayons plus ou moins piquants que les patients franchissent un en un le seuil de la grande porte du poste de santé de Keur Momar Sarr. Il est 9heures passées.
A l’intérieur, le décor est tout autre. Les patients, assis sous un hangar en chantier, attendent tranquillement d’être appelés à tour de rôle pour consultation. A l’entrée, à droite, un bâtiment vétuste attire notre attention. « C’est ici la maternité », nous apprend un homme au teint noir. Ibrahima, puis que c’est de lui qu’il s’agit est assis sur une chaise placée juste devant le pavillon. Il est le vendeur de tickets de consultation. Avare de parole, il s’explique, « Je n’a pas l’habitude de parler aux journalistes, je vais vous appeler Astou Niang, elle maitrise mieux que moi la maison ».
La voila, Astou, une dame mûre qui ne doit pas éloigner la quarantaine. Très à l’aise dans sa blouse verte, elle nous salue avec un petit sourire qui laisse entrevoir une belle dentition. Ce sourire contraste avec la précarité dans laquelle elle baigne. Apres quelque minutes d’hésitations, elle fait front et confie « Je suis un agent de santé communautaire, je suis là depuis six ans comme matrone ».
Ce poste de santé ne dispose pas de sage femme d’Etat. Les accouchements, les visites prénatales et natales, sont assurées par les agents de santé communautaire. « Nous faisons le même travail que les sages femmes et pourtant, nous ne jouissons ni de respect, ni de considération dans le poste », se désole t- elle.
Astou et ses consœurs dépassent les 8heures de temps travail prévues dans le code du travail. Elles travaillent même les week ends, pire, elles n’ont ni droit d’aller en grève, ni le droit à un congé. « On nous réveillent parfois à des heures très avancées de la nuit avec tous les risques que cela comporte. Nous n’avons pas de vie de famille pour me résumer », s’indigne t- elle. Malgré cette lourde tache, elles perçoivent des salaires misérables. «Mon salaire tourne autour de 30.000 FCFA. Mais il augmente un peu pendant la saison des pluies, période ou on enregistre plus de cas d’épidémie de paludisme », précise Ami Diop sa consœur. Elles sont payées en fonction des recettes de la vente des tickets et des médicaments.
Dans ces recettes, l’infirmier chef de poste y trouve son compte. De même qu’un quota est alloué au fonctionnement du poste. Et c’est le reste de cette somme que le vendeur de tickets et les relais communautaires, comme on les appelle, aussi se partagent.
Ibrahima Diallo, l’infirmier chef de poste reconnait et chante les mérites de ces « braves dames » tout en reconnaissant la misère dans laquelle elles se trouvent. « Nous savons mieux que quiconque qu’il est difficile de travailler sans aucun statut ni plan de carrière, mais la responsabilité ne nous incombe pas. Ce sont les textes qui sont fautifs » lance t – il. Avant de terminer « d’ailleurs, ce point est pris en compte dans notre plateforme revendicative que nous avons déposé au ministère ». Tout en étant plus malade que leurs patients, les ASC (agents de santé communautaire) de Keur Momar bénéficient d’une entière confiance auprès des populations et continuent à exercer fièrement leur métier.
Ndiol Maka SECK

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire